POUR VIVRE ICI
Je fis un feu, l’azur
m’ayant abandonné,
Un feu pour être son
ami.
Un feu pour m’introduire dans la nuit d’hiver,
Un feu pour vivre
mieux
Je lui donnai ce que
le jour m’avait donné ;
Les forêts, les
buissons, les champs de blé, les vignes,
Les nids et leurs
oiseaux, les maisons et leurs clés,
Les insectes, les
fleurs, les fourrures, les fêtes.
Je vécus au seul bruit
des flammes crépitantes,
Au seul parfum de leur chaleur ;
J’étais comme un
bateau coulant dans l’eau fermée,
Comme un mort je
n’avais qu’un unique élément.
Paul ELUARD